Puede descargar una versión en español de este blogpost aquí: Cleaver, S., Hudon, A. & St-Georges, M. (2021). Se necesitan diversos conocimientos para enfrentar las crisis ambientales. (Traducido de francés por Charles, D.). Moving Earth: Environmental Physiotherapy Association.

Là où nous sommes

Nous, les peuples occidentaux ou occidentalisés, avons beaucoup à apprendre des peuples autochtones. Nous, les auteurs de cet article de blog, sommes tous les trois descendants des colons arrivés de l’Europe. Quand nos ancêtres colons sont arrivés sur les terres que l’on considère aujourd’hui comme le territoire canadien, ils considéraient que, comme peuples civilisés, ils venaient pour remplacer les ‘sauvages’ qui vivaient déjà en ces terres. Ce projet de colonisation européen en Amérique du Nord a entraîné chez les peuples autochtones des catastrophes – des décès et des souffrances – qui restent impossibles à quantifier.

Si les pertes de vies et de bien-être n’étaient pas déjà suffisantes, l’humanité dans son entier a perdu encore davantage dans ce projet colonisateur : nous avons perdu des richesses inestimables issues de la diversité. Par exemple, des façons de vivre et de concevoir le monde, des systèmes économiques et d’échanges, et de multiples connaissances (parfois appelées « les connaissances traditionnelles ») ont été ignorés et mis de côté. Il est vrai que tout n’a pas été perdu : plusieurs peuples autochtones ont réussi à conserver leurs cultures et même à poursuivre leur enrichissement et ce, malgré la violence coloniale ambiante continue. Cependant, lorsque nous réfléchissons à l’état d’un monde gouverné par quelques empires et dominé par un système économique orienté vers la consommation et la croissance, il devient normal de s’insurger contre cette perte de diversité.

D’ailleurs, cette perte de richesses idéologiques, culturelles et procédurales a coûté cher à la Terre. Bien qu’il existe de nombreuses cultures autochtones et qu’elles soient toutes distinctes et différentes, force est d’admettre qu’une grande majorité d’entre elles avaient et ont toujours en commun le respect de la Terre puisqu’elle est considérée comme source de vie. Les peuples autochtones avaient avant notre arrivée, et entretiennent toujours, des modes de vie et de pensées qui visent à maintenir l’harmonie avec la nature et la Terre. Cette façon de vivre et de penser des peuples autochtones qui invite à prendre soin de la Terre contraste largement avec les schèmes occidentaux qui visent à exploiter un maximum la Terre alors qu’elle ne pourra bientôt plus le supporter.

Le remplacement de la diversité par la monoculture

Avant le colonialisme des empires européens qui a débuté au 15e siècle, plusieurs peuples autour de la planète vivaient et fonctionnaient selon leurs situations contextuelles spécifiques. Avec l’établissement de la domination coloniale se sont implantés des systèmes universels et mondiaux : une économie mondialisée, une science unique, quelques langues dites internationales et une diminution des options d’organisation politique et légale. En d’autres mots, on peut dire que la domination coloniale a remplacé la diversité autrefois existante pour la monoculture.

Monoculture : « Culture d’une seule espèce végétale dans une exploitation agricole (vigne, arbres fruitiers, blé) ».

Emprunté au domaine de l’agriculture, le concept de la monoculture nous aide à voir les avantages et les inconvénients de l’homogénéisation. Les proposants des monocultures signalent les avantages de tout miser sur LE système optimal. Avec des conditions contextuelles stables, cette optimisation permet une augmentation de la productivité. De là, on peut continuer à raffiner ce système optimal pour d’autres gains incrémentaux.

Dans un sens limité, ces avantages sont réels. Cependant, les inconvénients des monocultures sont également importants. Avant tout, l’homogénéité des monocultures les rend vulnérables à des conditions menaçantes. Pour aider à les concevoir, pensons aux exemples issus du secteur agro-alimentaire dans lesquels le manque de résilience d’une seule variété d’aliment peut entraîner l’échec total d’une récolte s’il advient une maladie, une sècheresse ou des températures extrêmes.

Shaun Cleaver (PhD)

Shaun Cleaver (PhD)

Lecturer, McGill University School of Physical & Occupational Therapy

Comme chercheur, Shaun explore les politiques publiques et les services en collaboration avec des personnes en situation de handicap. Comme enseignant, Shaun s’intéresse à la santé mondiale et communautaire et au professionnalisme.

Anne Hudon (PT, PhD)

Anne Hudon (PT, PhD)

Professeur adjointe / Assistant professor chez Université de Montréal

Thème clé de ses recherches: Les aspects éthiques de la pratique, notamment l’éthique professionnelle et l’équité dans les soins, l’analyse des politiques de santé, la réadaptation après une lésion professionnelle et l’amélioration des services de réadaptation pour les personnes vivant avec une déficience physique et de la douleur chronique.

Mélodie St-Georges (She/Her)

Étudiante de Baccalauréat en physiothérapie à l'Université de Montréal

Passionate about social justice and saving our beautiful planet 🌎

Photo by Loren King on Unsplash

A contrario, on peut qualifier les diverses façons de faire des peuples vivant pendant les époques précoloniales de « cultures durables », puisqu’elles ont pu être maintenues pendant des milliers d’années. Il est important de souligner que la diversité des façons de faire de ces peuples (culturelles, économiques, procédurales, interactionnistes) misaient davantage sur l’interaction entre les composantes des différents écosystèmes (polyculture) ainsi que sur la qualité de ces interactions, et moins sur la maximisation d’une seule et même composante de ce système, considéré comme idéale. Ce n’est pas du tout le cas pour les « monocultures » des régimes coloniaux actuels qui, en très peu de temps, ont réussi à polluer abondamment, à ravager les stocks de ressources naturelles, à déstabiliser le climat et à inciter un événement d’extinction de masse en détruisant la biodiversité.

Les peuples autochtones ont d’ailleurs déjà pris conscience de l’importance de revoir les logiques monolithiques afin de faire face aux changements climatiques qui sévissent. En 2015 est née l’Alliance des Gardiens de Mère Nature (AGMN), un mouvement international pacifiste unissant des peuples autochtones et les personnes alliées de partout à travers le monde afin de proposer des solutions à la crise environnementale qui s’inspirent des savoirs et des traditions autochtones. En 2017, l’Alliance a déposé 18 propositions à cet effet dans la Déclaration de l’Alliance des Gardiens et Enfants de la Terre Mère. L’Alliance travaille aussi en équipe avec les allochtones, car la sauvegarde de la Terre est la responsabilité de tous et toutes.

En regard des éléments présentés dans ce texte concernant l’hégémonie de la monoculture dans le cadre des sociétés coloniales actuelles et les avantages incontestables que présentent la « polyculture » comme pratique durable favorisant la diversité, il devient donc évident que pour confronter les crises environnementales qui sévissent maintenant, il faudra utiliser des logiques différentes de celles qui ont entraîné ces crises. Lorsqu’on considère que l’avènement des « monocultures » issues du colonialisme ont contribué à la dégradation de l’environnement et des écosystèmes sur la Terre, l’importance de la diversité des systèmes, tels que la diversité qu’apporte et qu’incarne les peuples autochtones à travers le monde, prend ainsi tout son sens.

Références :

Alliance de Gardiens de Mère Nature (2017). Déclaration de l’Alliance des Gardiens et Enfants de la Terre Mère: Un appel mondial aux Etats et à l’humanité pour la préservation de la vie sur la planète et celle des générations futures. http://allianceofguardians.org/doc/call2017/AGMN_appel-mondial-2017_FR.pdf

Garric, Audrey (2017). « La sixième extinction de masse des animaux s’accélère ». Le Monde, le 10 juillet 2017. https://www.lemonde.fr/biodiversite/article/2017/07/10/la-sixieme-extinction-de-masse-des-animaux-s-accelere-de-maniere-dramatique_5158718_1652692.html

Jase, Vincent (2016). Les dangers de la monoculture. Agence Science-Presse. https://www.sciencepresse.qc.ca/blogue/vincent-jase/2016/11/24/dangers-monoculture

Monoculture (sans date). Dictionnaire Larousse. Consulté le 22 septembre 2021. https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/monoculture/52292

 

Autres ressources intéressantes :

Assemblée des Premières Nations (2020). Rapport sur le Rassemblement national sur le climat. http://www.afn.ca/wp-content/uploads/2021/04/Climate_Gathering_Report_FRE.pdf

Moody, Oluwatobiloba (2020). Action pour le climat et durabilité : les peuples autochtones au cœur de la solution. Abuja : Organisation mondiale de la propriété intellectuelle. https://www.wipo.int/wipo_magazine/fr/2020/01/article_0007.html

Rahmani, Sabah (2019). Paroles des peuples racines. Plaidoyer pour la Terre. France : Actes Sud, 208p.

 

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